Dans un monde en constante évolution, où les avancées technologiques transforment nos modes de vie et nos industries, le secteur de la santé n’échappe pas à cette révolution numérique. Les hôpitaux et les établissements de soins doivent s’adapter rapidement pour offrir des services de qualité supérieure tout en rationalisant leurs opérations internes. Dans ce contexte, le Cloud émerge comme une opportunité révolutionnaire pour les départements des systèmes d’information (DSI) des hôpitaux.
Nous avons interviewé Alexandre Lemaresquier et Benoit Bayol respectivement Head of SecDevOps et Principal Software Engineer & Data Scientist chez Incepto et Jean Christophe Calvo Chef de Département /Département territorial de la Transformation Numérique et de l’Ingénierie Biomédicale au CHRU de Nancy pour avoir leur opinion sur cet enjeu majeur.
Comment décririez-vous, de manière très simple ce qu’est le Cloud ?
AL / BB : Le cloud est un moyen de fournir de l’infrastructure et des services informatiques à distance, en gérant les datacenters, les machines et les softwares qui s’y trouvent à la place des clients (nous et nos clients).
JCC : C’est un service d’hébergement externalisé, agile, souple, scalable, transparent et rapide.
C’est une cible pour nous établissements de santé que l’on va chercher à atteindre et qui va nous permettre de répondre à plusieurs besoins, notamment de nous défaire de la lourdeur de nos infrastructures sur des taches qui potentiellement présentent une faible valeur ajoutée.
Le cloud est porté par des industriels dont c’est le métier. Ils ont la capacité de maintenir un niveau de services très élevé avec des normes de sécurité beaucoup plus importantes que ce que l’on a les moyens de porter localement dans nos propres datacenters.
– Pourquoi est-il intéressant pour un établissement de définir une stratégie sur le cloud versus les autres options de stockage (serveurs locaux) ?
AL / BB : Pour un établissement de santé, il est intéressant d’utiliser le cloud pour éviter les coûts d’investissement dans une infrastructure locale et de sa maintenance. Il est beaucoup plus facile d’ajuster la consommation à la hausse ou à la baisse, ou même de changer de solution en partie ou complètement.
JCC : La lourdeur de l’investissement dans des serveurs locaux et notamment pour le renouvellement de l’infrastructure est très conséquente. Si l’on veut assurer une non-obsolescence de l’infrastructure cela revient tous les 5 ans.
Cependant l’aspect financier d’une stratégie cloud est primordial. Est-ce que l’hébergement seul est intéressant ? Est-ce que le service métier/logiciel en mode SaaS qui s’appuie sur le cloud va également l’être d’un point de vue RH, d’investissement, de sécurité ?
Aujourd’hui les gros « Clouders » ont un enjeu de réputation quant à la fuite de données. Il y a donc un niveau de sécurité ++ qui est extrêmement important pour nous, établissements de santé.
– Est-ce que le Cloud a des avantages pour l’environnement en comparaison avec les autres options de stockage ? (Émissions de CO2) ?
AL / BB : Les gestionnaires de datacenters sont forcément plus à même d’optimiser l’utilisation et l’origine des ressources qu’un établissement de santé dont ce n’est pas le métier principal. Par exemple, Amazon Web Services a annoncé être en mesure d’utiliser 100% d’énergie renouvelable en 2025 (avec 5 ans d’avance sur le plan d’origine), devenir “water positive” en 2030 (produire plus d’eau que sa consommation) et neutre en carbone d’ici 2040. Source: ReInvent 2022
En 2021, 13 régions étaient à 95% d’énergie renouvelable, la moitié en Europe dont l’Irlande (où Incepto héberge son infrastructure) et Paris.
JCC : Logiquement sur de la massification d’environnement et de ressources, nous pouvons estimer sans trop se tromper que l’on atteint des objectifs de moindre consommation d’énergie et de rejet de C02.
– Est-ce que cela demande de l’expertise à un industriel d’héberger ses solutions dans le cloud ? Qu’est-ce que l’on va chercher à faire ou à optimiser ?
AL / BB : Pour héberger ses services dans le cloud il faut quelques connaissances mais c’est généralement assez facile d’accès. Pour la production, la maintenance et l’optimisation des coûts en revanche, il est préférable de passer par des spécialistes (SaaS, ESN)
JCC : Oui cela nécessite clairement de l’expertise. En fonction du niveau d’hébergement vers lequel on va aller, l’expertise sera plus ou moins forte.
C’est intéressant d’un point de vue financier de ne plus avoir l’obligation de faire les renouvellements d’infrastructures mais intéressant d’un point de vue RH.
En effet, si l’on décale juste son stockage et son hébergement dans le cloud, on n’optimise rien du tout et l’on peut même se retrouver en difficulté car l’on est en mode hybride. On va donc chercher à avoir un modèle économique achetable et plus adapté à la santé, avec un accompagnement humain, notamment sur la gestion des incidents.
– Que recommandez-vous d’auditer pour un établissement quand vous faites du Cloud ?
AL / BB : Pour qu’un établissement de santé puisse utiliser le cloud efficacement pour l’aide au diagnostic en imagerie médicale il est conseillé d’avoir un liaison Internet d’un niveau professionnel.
JCC : Tout ! Si l’on veut faire du cloud il faut aussi se poser la question du service final pour l’utilisateur.
– Comment les solutions d’hébergement cloud ont-elles évoluées ces dernières années ? Est-ce que l’on a atteint un niveau de maturité ?
AL / BB : L’évolution des services cloud a été très grande depuis leur invention par AWS en 2006 et l’arrivée des gros concurrents comme Google et surtout dernièrement Microsoft Azure qui a consolidé un marché professionnel déjà mature depuis une dizaine d’années.
JCC : Oui les solutions ont évolué. Plus sur les gros acteurs que sur les petits qui ont un niveau de service assez impressionnant. Mais pour moi le niveau de maturité n’est pas encore atteint. Y aura-t-il un niveau palier ? je ne pense pas, l’histoire montre en effet que ce marché est en constante évolution.
– Quels sont les bénéfices du Cloud certifiée HDS dans l’Union Européenne ?
AL / BB : La certification HDS (hébergement données santé) est française mais elle a tellement plu à AWS qu’elle est appliquée dans le monde entier (les 18 régions principales sont certifiées). Elle garantit la sécurité, la confidentialité et l’intégrité des données de santé. Voici comment AWS l’intègre dans ses conditions :
Conformément au modèle de responsabilité partagée, la certification HDS d’AWS démontre la « Sécurité du cloud », permettant aux clients de concentrer leurs ressources sur les objets liés à la « Sécurité dans le cloud » en lien avec leur processus de certification HDS.
JCC : C’est avant tout des garanties de sécurité, de non-vol de données, de conformité. Nous avons un niveau de protection en Europe qui est largement supérieur à celui de certains pays et il ne faut surtout pas revenir en arrière.
Le mouvement est très positif mais en tant que DSI j’attends aujourd’hui plus que le simple hébergement avec une notion de gestion totale et verticale pour pouvoir gagner du temps et le mettre au service de la bonne utilisation des logiciels en étant plus proche de nos professionnels plutôt qu’au service de la maintenance et de la gestion de l’infrastructure.