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Tribune

Jean Michel Malbrancq
Co-founder

3 mesures dont notre système de santé a besoin et mises en évidence par la crise du covid-19

Au sortir d’une crise sanitaire sans précédent dans notre histoire récente, nous sommes confrontés à 3 défis importants tous parfaitement identifiés :

· Mieux rémunérer les soignants
· Trouver la bonne gouvernance pour les hôpitaux
· Soutenir la recherche et l’innovation en santé

Mieux rémunérer nos soignants : Avec un peu plus de 11%, la France se positionne en tête de liste des pays européens lorsque l’on regarde le budget de la santé en pourcentage du PIB; elle est également dans le peloton de tête lorsque l’on ramène ce budget à la dépense en euro par habitant.

Pourtant, dans notre pays, le personnel hospitalier n’est pas rémunéré à la hauteur de ce qu’il est payé en moyenne en Europe, la densité des équipements est inférieure à la moyenne européenne et l’innovation indispensable à la transformation n’y est pas ou peu rémunérée… L’autre pays européen de taille comparable au nôtre et dépensant la même chose que nous c’est l’Allemagne mais avec un contexte à l’opposé du nôtre; personnel mieux payé, équipements beaucoup plus nombreux, innovation valorisée, recherche clinique et académique mieux supportée et surtout un tissu industriel “mittelstand” très actif dans le domaine de la santé permettant à l’Allemagne d’être à la fois un fournisseur de premier plan de nombreux grands groupes et en même temps un acteur majeur dans nombre de secteurs des technologies de la santé. Au-delà des décisions immédiates qui doivent être prises pour la revalorisation nécessaire des salaires, il faut poser les jalons de réformes plus profondes permettant de répondre à tous ces défis.

Des soignants manifestent pour exhorter le gouvernement à fournir plus de moyens et de meilleures conditions de travail aux travailleurs hospitaliers et aux hôpitaux, devant l’hôpital Robert Debré à Paris, le 28 mai 2020. (Photo REUTERS/Charles Platiau)

 

 

Trouver la bonne gouvernance pour les hôpitaux : C’est un des défis dont on a beaucoup parlé. J’ai eu la chance d’être membre du Conseil d’Administration de l’hôpital Marie Lannelongue puis d’en assumer la direction générale. J’y ai découvert l’organisation des ESPICs (Établissement de Santé Privé d’Intérêt Collectif). Les ESPICs ont pour ambition d’offrir à tous les patients les meilleurs soins sans reste à charge; ils ont de fait une mission de service public mais tous les avantages d’une gestion privée. C’est un excellent modèle pour le futur de notre système de santé car il combine responsabilité et capacité d’agir. Ces établissements connaissent, dans une moindre mesure que le secteur public, des difficultés pour équilibrer leur budget. Par contre ils ont une capacité d’adaptation et de changement qui leur permet d’innover et de se développer.

Un établissement comme l’hôpital Marie Lannelongue, très spécialisé en chirurgie cardio-vasculaire et thoracique est par construction plus fragile car la chirurgie de manière générale crée moins de marge que la médecine et dans le cas de HML où il s’agit de séjours lourds, une petite baisse d’activité se traduit par une variation sensible des revenus et l’éloigne rapidement de son point d’équilibre. C’est pour cela qu’en un temps record nous avons décidé de développer de nouvelles activités de médecine autour de nos spécialités. En 2 ans, nous avons pu intégrer une nouvelle équipe venant du privé, trouver un accord avec la CNAM et l’ARS pour définir le futur du nouvel hôpital et acter de notre fusion avec l’hôpital Paris Saint Joseph. Ces changements ont été menés avec le support du corps médical et des représentants du personnel démontrant l’engagement et la capacité d’adaptation des équipes.

Soutenir la recherche et l’innovation en santé : La contribution de la FEHAP (ESPIC) et Unicancer (CLCC) à la loi de programmation pluriannuelle de la Recherche nous apprend que les établissements ESPIC-MCOs représentent environ 9% de l’activité en hospitalisation conventionnelle, mais 18% de la recherche académique (Indicateurs MERRI). Les Centres de Lutte Contre le Cancer, réunis au sein d’Unicancer ont des statuts similaires aux ESPICs. Ils sont des acteurs majeurs de la recherche en cancérologie et se situent au 1er plan des publications dans ce secteur; 15 à 18% des patients pris en charge par un CLCC sont inclus dans un essai clinique contre 9% en moyenne pour les établissements de santé français.

L’innovation est essentielle au système de santé pour lui permettre de continuer à offrir à tous les patients le parcours de soin le plus adapté. Une innovation majeure se dessine sous nos yeux et elle est la conséquence de la combinaison du “big data” et de nouveaux algorithmes permettant d’avoir une meilleure cartographie pour guider les choix. L’intelligence artificielle ne va pas remplacer le besoin d’avoir des soignants bien formés et des hôpitaux bien gérés mais elle va donner à tous les acteurs des outils nouveaux qui permettront de mieux objectiver les choix pour le bénéfice des patients et du personnel. Ceux qui sauront intégrer ces outils dans leur travail seront capables d’offrir une meilleure qualité de soin et s’inscriront les premiers dans la promesse d’une médecine personnalisée, prédictive, participative et préventive. À son niveau, l’engagement et la promesse d’Incepto c’est de rendre l’intelligence artificielle et toutes les applications en intelligence artificielle accessibles à tous les utilisateurs de l’imagerie, du CHU au plus petit centre; de l’expert radiologue au clinicien non radiologue. À chacun dans son domaine, la promesse d’Incepto c’est de ne pas le laisser seul.

Forts de la motivation de tous les soignants qu’ils soient du public ou du privé, riches d’expérience de management qui fonctionnent au quotidien et sur la durée et d’un grand nombre d’entreprises et de startups qui ont la volonté d’apporter leur contribution à cette transformation de notre système de santé, nous avons les conditions réunies pour être dans le peloton de tête en terme de qualité des soins mais aussi pour créer un tissu entrepreneurial et faire que la santé ne soit pas seulement vue comme une source de coût mais aussi d’innovation et de revenus pour notre pays et de nous inscrire durablement dans un modèle social européen qui nous est cher et que nous devons défendre.

Cet article a été publié sur le HuffPost le 15/10/2020.